Mala et la Lune (French only)

Lorsque Mala me confia qu’elle était amoureuse de la Lune, je ris.

« Tu ne peux pas être amoureuse de la Lune, dis-je, amusé. Elle ne peut pas te voir, ni te parler.

— Qu’importe, répliqua-t-elle, tant que moi, je peux voir sa lumière ou me confier à elle. »

Je haussai un sourcil. « Comment sais-tu qu’elle t’écoute?

— Je ne le sais pas.

— Alors pourquoi te confier à elle?

— Quelle différence ça fait, qu’elle m’écoute ou pas? » Je restai silencieux. « Ce qui est plus important, c’est que la Lune est toujours là, même lors des moments les plus difficiles. »

Je baissai les yeux. « Veux-tu passer par le pont? » C’était une chaude journée d’été qui commençait tout juste à s’adoucir, et la brise de fin d’après-midi portée par la rivière, dont nous longions les courbes étincelantes, était délicieuse. Le chemin de retour nous offrait deux options : la forêt ou le pont. J’avais toujours préféré le pont, avec le vent frais de la mer, le vent doux des collines. Mala, quant à elle, préférait la forêt: les chants des oiseaux et des cigales la calmaient.

« Et puis, reprit Mala sans se soucier de mon intervention, la Lune est changeante, mais constante. Sa lumière diminue et disparaît, mais je sais que je peux toujours compter sur son retour.

— Cette lumière n’est pas la sienne, de toute façon. Elle ne fait que refléter celle du soleil.

— C’est peut-être pour ça qu’elle est si belle. »

Je me tus un instant, par incompréhension ou bien par contemplation. Mala se fatiguait à transporter notre large panier débordant de fleurs, qui était plus encombrant que lourd, alors je me penchai vers elle et le lui pris des mains.

« Qu’est-ce que tu fais? dit-elle.

— Je t’aide. Pont ou forêt? »

— Forêt. Redonne-moi ça. »

Elle s’étira et reprit le panier, le posant sur sa tête et le maintenant en équilibre d’une main. Après un moment, je dis :

« La Lune ne peut pas te prendre dans ses bras pour te réconforter.

— Non, dit Mala, mais elle crée les vagues, qui viennent me bercer dans mon sommeil.

— La Lune ne peut pas non plus être désolée lorsqu’elle te blesse. »

Elle ne répondit pas. Nous venions d’entrer dans la forêt, et les rayons de lumière traversant la voûte clairsemée formaient des taches changeantes et réfléchissantes sur sa chevelure dorée. Un silence se creusa, seuls les sons de nos pas et de notre respiration perçant la musique de la nature que Mala aimait tant. Le panier de fleurs ralentissait Mala, et je la dépassai, n’osant plus par la suite me retourner pour lui offrir mon aide.

« Si tu étais une deuxième Lune dans notre ciel, dis-je finalement, je te regarderais à chaque nuit. »

Je l’entendis sourire, puis sentis sa douce main se glisser dans la mienne.

« La Lune ne peut pas me prendre par la main lorsque je marche dans la forêt, » dit-elle.